A fréquenté les ateliers du Créahm Région Wallonne, Liège de 1992 à 2012.
Tout a commencé avec un catalogue de la collection du Musée royal de l'Afrique centrale à Tervuren qui traînait dans l'atelier. Ce livre, Jean El Tannir l'a parcouru, maintes et maintes fois, au point qu'il est aujourd'hui complètement démantibulé. Les arts africains ont profondément inspiré l'auteur qui y a puisé un registre de formes. De là, proviennent peut-être aussi les motifs qui recouvrent ses pièces, « scarifications », petits signes élémentaires : traits parallèles ou juxtaposés, hachures, croix… Autre caractéristique récurrente, l'hyper sexualisation de ses personnages qui, en règle générale, arborent des sexes cyclopéens. Ces mêmes formes oblongues ithyphalliques apparaissent aussi pour représenter les seins voire, parfois, les cheveux. La confusion règne quant à l'identité sexuelle des êtres qu'il façonne dont il n'est pas rare qu'ils arborent à la fois un phallus, des seins et de proéminentes fesses galbées.
Catalysé par les créations issues de l'Afrique noire, Jean El Tannir s'est forgé un style, une identité esthétique qui, par la suite, s'est appliquée à d'autres objets. La découverte de l'art des Amérindiens est venu enrichir son vocabulaire graphique de même que les sculptures de l'artiste liégeoise Mady Andrien, en particulier l'érotisme caressant de ses représentations de couples. Aujourd'hui, Jean El Tannir fait flèche de tous bois, réinterprète les images les plus diverses, qu'il s'agisse d'une publicité ou d'une photographie de sa copine. Les volumes se muent en excroissances, il martyrise le sujet initial, lui fait subir des torsions expressionnistes… La comparaison entre l'original et la « copie » est, ici, un exercice des plus délectables.
DEJASSE, Erwin, art. « Jean El Tannir », in Jaune Ciel ou Blanc Foncé, 2010, pp. 46-49.